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13|11|13 La taxation distincte des indemnités BAJ, enfin une victoireLa taxation distincte des indemnités BAJ, enfin une victoireLa taxation distincte des indemnités BAJ, enfin une victoire

La taxation distincte des indemnités BAJ, enfin une victoire

 

La règle pour l’imposition des revenus professionnels est l’imposition progressive par tranche, néanmoins certains revenus sont imposables distinctement. Cette taxation distincte est intéressante pour le contribuable dès lors que le code prévoit explicitement que celle-ci ne sera appliquée qu’au cas où elle se révélerait être plus intéressante pour le redevable comme le confirme l’article 171 du CIR92 qui dispose que :

 

« Par dérogation aux articles 130 à 168, sont imposables distinctement, sauf si l’impôt ainsi calculé, majoré de l’impôt afférent aux autres revenus, est supérieur à celui que donnerait l’application desdits articles à l’ensemble des revenus imposables ».

 

Dans ces conditions, il est indubitablement intéressant de faire relever de cette catégorie certains revenus perçus au cours de la période imposable.

 

Or, au sein des revenus visés par cet article se retrouvent les arriérés de profits. Ceux-ci, soit les émoluments perçus au cours d’une période imposable en raison du travail fourni lors d’une période imposable précédente, sont imposables distinctement s’ils répondent aux conditions imposées à l’alinéa 6 du même article, soit :

 

« – les profits visés à l’article 23, § ler, 2°, qui se rapportent à des actes accomplis pendant une période d’une durée supérieure à 12 mois et dont le montant n’a pas, par le fait de l’autorité publique, été payé au cours de l’année des prestations mais a été réglé en une seule fois, et ce exclusivement pour la partie qui excède proportionnellement un montant correspondant à 12 mois de prestations ».

 

L’application de la taxation distincte des arriérés de profits dépend donc de trois conditions cumulatives:

 

1. les profits doivent se rapporter à des actes accomplis pendant une période d’une durée supérieure à douze mois,

2. ils ne doivent pas avoir été payés dans l’année des prestations par le fait de l’autorité publique,

3. ils doivent avoir été réglés en une seule fois.

 

Il est évident que la condition qui pose le plus de problème et qui est, de fait, la plus souvent discutée est de « ne pas avoir été payés dans l’année par le fait de l’autorité publique ». Cette condition, qui n’est pas autrement définie, s’est révélée particulièrement contestée en matière de taxation des indemnités allouées dans le cadre de l’aide juridique de deuxième ligne.

 

Il est en effet constant que ces indemnités, en raison de la procédure qui concourt à leur attribution, ne sont payées, au plus tôt, que l’année suivant celle au cours de laquelle les prestations ont été réalisées.

 

Il restait donc à déterminer si cette attribution tardive était « le fait de l’autorité publique ». La jurisprudence ayant tendance à considérer que ces termes devaient s’entendre comme impliquant une négligence fautive dans le chef de l’autorité publique attribuant le paiement. Cette conception restrictive limitait les possibilités pour les contribuables de faire ressortir certains profits de cette catégorie de revenu. Elle faisait également échec à la possibilité, pour les avocats, de faire imposer distinctement les indemnités susvisées. Celles-ci étant payées, certes tardivement, mais sans qu’une faute puisse être imputée à l’Etat belge.

 

Cette conception vient heureusement d’être remise en question par le tribunal de première instance de Liège dans son jugement du 30 septembre 2013.

 

En effet, le juge a considéré que la disposition litigieuse n’exigeait nullement que la tardiveté du paiement soit la conséquence d’une négligence ou d’une omission fautive de l’autorité, ni que cette tardiveté ait un caractère exceptionnel, dès lors que  le législateur avait employé les mots « par le fait de » et non les mots « par la faute de ». Ce faisant le juge a fait une application correcte des principes d’interprétation et plus particulièrement de la règle «  un texte clair ne s’interprète pas ».

 

Cette constatation a conduit le juge à valider la qualification d’arriérés de profit des indemnités perçues dans le cadre de l’aide juridique, les paiements tardifs étant indéniablement la conséquence du système de paiement mis en place par l’Etat. Pour le surplus, le juge se permet de faire remarquer que « En toute hypothèse, on peut douter que le système, tel qu’il est organisé, notamment en ne prévoyant aucun octroi de provision pour les prestations de longue durée, soit exempt de toute faute dans le chef de l’autorité publique » ce qui permet d’écarter les objections des partisans de l’interprétation restrictive que nous avons décrite supra.

 

Cette décision consacre ainsi une lecture cohérente de l’article 171, et devrait permettre de revaloriser quelque peu les « indemnités BAJ ». Elle sera également applicable aux arriérés de rémunérations visés à l’article 171, 5° du CIR92, dès lors que la taxation distincte de celles-ci répond aux mêmes conditions.

 

 

Julien Motllo